Le règne de la violence et de l’hypocrisie
Article d’André Arru paru sur le n° 12/13 (Juil.Oct.1972) de "La Libre Pensée des Bouches-du-Rhône"
Article mis en ligne le 7 août 2016

par SKS

1972 : au cours des Jeux olympiques d’été de 1972 à Munich, le 5 septembre des membres de l’équipe olympique d’Israël sont pris en otage et assassinés par des membres de l’organisation palestinienne Septembre noir. Bilan : onze membres de l’équipe olympique israélienne assassinés, un policier allemand tué, cinq des huit terroristes tués, les trois autres capturés.
Le 9 septembre, des avions de la force aérienne israélienne bombardent des bases de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) en Syrie et au Liban faisant environ 200 victimes.

"Jamais peut-être jusqu’à présent la violence n’a eu autant cours dans ce monde" dit notre ami, blessé dans ses convictions pacifistes...
Aujourd’hui, la violence n’a pas cessé d’ensanglanter la planète.
Certains passages du texte, notamment sur les réponses aux attentats ou sur les Jeux Olympiques, sont toujours d’actualité... hélas !

Jamais peut-être jusqu’à présent la violence n’a eu autant cours dans ce monde. Jamais non plus ceux qui crient « à l’assassin » n’ont été les uns aussi retors, les autres aussi jobards.
Ce qui est remarquable, c’est que ceux qui tuent, trouvent toujours des apologistes qui provoquent ainsi la venue de nouveaux assassins et de nouveaux martyrs.

Je sais qu’en dehors de l’apologie, on est tenté de trouver des excuses pour ceux dont le sort nous émeut. Ce n’est pourtant pas la violence aveugle ou calculée qui simplifiera les problèmes, et encore moins permettra de les résoudre. Les vaincus auront toujours des moments de révolte sauvage et les vainqueurs des gestes de répression révoltante. Il en a été ainsi pour l’affaire de Munich où des apatrides dans un monde où la Patrie est une mystique, désespérés par l’impuissance de leurs compatriotes, ont entraîné dans la mort d’autres hommes peu responsables du sort des Palestiniens. Les gouvernants d’Israël, enfermés dans leur orgueil, ont refusé de faire le geste qui pouvait peut-être sauver tout le monde, et, laissant libre cours à une vengeance étudiée, faisaient le lendemain deux cents morts aussi innocentes du drame de Munich que les victimes israéliennes.

Inutile d’épiloguer et de chercher les vrais responsables. Il faudrait remonter le cours de l’Histoire, y impliquer beaucoup de monde et on ne s’y retrouverait tout de même pas.
Les solutions possibles sont toutes à base de paix, de raison, d’égalité sociale, de respect de tous ses semblables. Elles ne semblent pas faites pour un monde comme le nôtre où toutes ces valeurs n’ont pas cours ni chez les gouvernants, ni chez les gouvernés.

Alors ? Il ne nous reste qu’à ne pas hurler avec les loups. Ne pas suivre ces hypocrites salauds, menteurs et carnassiers qui nous présentent par exemple les Jeux Olympiques comme une trêve de paix dans un coin du monde lorsque c’est le meilleur tremplin au chauvinisme le plus abject. Ne pas être complice des faux traumatisés par le drame de Munich. Le drame existait avant, il en existe encore partout dans le monde : au Vietnam, au Brésil, en Argentine, au Burundi, au Bangladesh, en Bolivie, en Colombie, en Irlande, au Tchad, et j’en passe…

L’exemple du carnage n’a pas été donné à Munich, et s’il ne m’est pas possible d’approuver les actes des hommes de Septembre Noir, ni ceux de l’armée d’Israël le surlendemain, je pourrais trouver aux uns et aux autres des excuses que n’ont pas les aviateurs américains qui bombardent les civils du Vietnam, ni les militaires français qui ont guerroyé (et guerroient encore ?) au Tchad, pour ne parler que de ceux-là.

Ne soyons pas non plus complices d’un cycle infernal : la révolte violente, nous le savons, engendre la répression sauvage, qui à son tour provoque de nouvelles violences. C’est ainsi que nous avons vu des révolutions se transformer en dictatures, d’ex-révolutionnaires prendre le pouvoir et devenir des tyrans, d’ex-victimes devenir à leur tour des bourreaux.

Les bains de sang n’ont jamais fait un homme sain, ils le gangrènent par l’intérieur.

André ARRU


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